« Je suis désolé monsieur, mais je dois vous annoncer que vous souffrez d’un syndrome métabolique. »-« Vous devez me confondre avec un autre patient docteur, je me sens en pleine forme ! »
Cette réaction de Monsieur M n’est pas rare ! A 42 ans, employé de banque avec une carrière impressionante, marié, 2 enfants, il a bien réussi dans sa vie professionnelle et sa vie privée. Et surtout sans le moindre signe de maladie ou de douleur, il ne peut donc croire ce que le médecin essaie de lui expliquer.
C’est vrai que pour réussir à la banque, il a dû abandonner son sport favori à cause des heures supplémentaires et faire de nombreux repas d’affaires avec des clients. Et le week-end est souvent consacré à se reposer devant la télé en regardant le foot ou d’autres événements sportifs.
Résultat : sa taille de sportif s’est transformée en petit tambour (périmètre abdominal supérieur à 102 cm), les valeurs des triglycérides (graisses du sang) se sont élevées et le « bon » cholestérol, le HDL-C est bas. La tension artérielle est élevée à 160/90 mmHg et sa glycémie dépasse les 110mg/dl.
Tout cela ne se « sent » pas, comme par exemple une appendicite ou un avant-bras cassé, mais cet assemblage de petits « soucis » est potentiellement mortel ! Le risque d’avoir un accident vasculaire (que ce soit une « attaque » cardiaque ou cérébrale) est alors fortement augmenté, de l’ordre de 20 à 25% c.à d. une chance (ou plutôt malchance) sur cinq ou sur quatre d’avoir une attaque dans les 10 ans à venir.
Pour Monsieur M. cette statistique est malheureusement beaucoup plus élevée que celle de gagner au Lotto, comme il le fait consciencieusement tous les WE.
Donc, maintenant c’est officiel : Il est malade, même en l’absence de sensation de malaise ou tout autre syptôme ! On le bombarde de termes compliqués comme « insulino-résistance », « rétinopathie » et « néphropathie », et Monsieur M finit par se dire qu’il n’aurait jamais dû aller à ce check-up offert par sa firme, car depuis ce moment tout va de travers. Se sentir confronté à des parties moins « parfaites » du soi est une nouvelle expérience pour Monsieur M et ne lui plait guère.
Les experts lui ont conseillé de changer son style de vie : salade à midi au lieu du « Schnitzel-frites », une petite promenade le soir au lieu de se jeter devant la télé, reprendre les escaliers au lieu de l’ascenceur…, mais comment arriverait-il à changer ses habitudes peaufinées la dernière vingtaine d’années ?!
En plus, il faudrait prendre un médicament pour le sucre, un pour la tension artérielle, voire même une troisième pilule pour le cholestérol.
Complètement démoralisé, Monsieur M a eu envie de tout plaquer, de simplement ignorer les faits et de laisser son sort au hasard. Mais finalement l’équipe de santé a trouvé une approche qui lui plait. Elle lui laisse le choix du chantier à attaquer en premier lieu.
Perdre un peu de sa bouée de secours était un projet qu’il avait déjà évoqué de nombreuses fois pour la nouvelle année. Avec l’aide de la diététicienne et de son épouse, il a donc commencé par changer ses habitudes alimentaires. Pas fondamentalement, mais en recherchant parmi les aliments qu’il aime le plus, il a pu constater qu’une certaine partie de ses plats préférés pouvaient rester dans le nouveau plan alimentaire, voire être plus fréquemment savourés. Plus fréquement, parce que d’autres plats aimés, réunissant trop de mauvaises graisses et de sucres ajoutés devaient donc forcément être moins fréquemment programmés.
Son épouse prépare une salade à emporter pour certains jours de la semaine et le temps gagné à ne pas attendre dans la file de la cantine est mis à contribution pour marcher dans le parc adjacent à la banque.
En premier lieu, Monsieur M a remarqué qu’il était beaucoup moins fatigué en début d’après- midi. Avant, il avait mis cette fatigue sur le compte de l’exploit intellectuel fourni le matin, mais maintenant, il se rend compte que c’était sa digestion du repas de midi qui utilisait toute son énergie. Avec un repas plus léger, il réduit donc son poids et gagne en même temps en productivité en début d’après-midi.
Après ces premiers kilos en moins, le hasard a bien fait les choses. Le meilleur copain de Monsieur M lui a proposé de l’emmener faire régulièrement un peu d’activité physique. Loin des ambitions de participer aux Jeux Olympiques, l’idée est plutôt de passer un bon moment ensemble tout en se dépensant un peu. Ce nouveau passe-temps bien agréable et convivial n’a pas seulement aidé Monsieur M à perdre encore quelques kilos et à améliorer ses glycémies, mais il se sent en plus beaucoup plus détendu et supporte mieux les longues journées, souvent stressantes de son travail à la banque.
Ce témoinage fictif met en valeur les nouveaux outils d’éducation thérapeutique. Dans un premier temps, il est essentiel d’identifier les besoins individuels et de définir les objectifs ensemble avec le thérapeute et le patient pour ensuite choisir les outils éducatifs appropriés. Ensuite une évaluation montre si l’objectif choisi a été atteint et entraîne un nouveau cycle d’identification de besoins. Ainsi les formations pour les patients qui dans le temps n’étaient que de simples présentations de théorie se transforment en un transfert de savoir-faire et d’analyse du problème personnel. Ces formations utilisent les resources personnelles pour renforcer la capacité d’anticipation et d’affirmation du soi.
Avec ces méthodes, l’adhérence de la personne aux nouveaux styles de vie est améliorée, la prise médicamenteuse plus régulière et les résultats au court et au long terme sont meilleurs.